Entrée en vigueur de la procédure en déchéance devant l’INPI

Comme indiqué dans l’article précédent, la procédure en déchéance de marque devant l’INPI est entrée en vigueur le 1er avril 2020.

Tout comme la procédure en nullité, toute personne physique ou morale peut engager une procédure en déchéance sans avoir à démontrer un intérêt à agir.

La procédure se fait de manière exclusivement électronique.

1.Quels sont les fondements possibles à l’appui de la demande en déchéance

a. Le défaut d’exploitation de la marque contestée si celle-ci n’a pas été exploitée pendant 5 ans

Ce fondement est prévu par l’article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle :

« Encourt la déchéance de ses droits le titulaire de la marque qui, sans justes motifs, n’en a pas fait un usage sérieux, pour les produits ou services pour lesquels la marque est enregistrée, pendant une période ininterrompue de cinq ans. Le point de départ de cette période est fixé au plus tôt à la date de l’enregistrement de la marque suivant les modalités précisées par un décret en Conseil d’Etat.

Est assimilé à un usage au sens du premier alinéa :

1° L’usage fait avec le consentement du titulaire de la marque ;

2° L’usage fait par une personne habilitée à utiliser la marque collective ou la marque de garantie ;

3° L’usage de la marque, par le titulaire ou avec son consentement, sous une forme modifiée n’en altérant pas le caractère distinctif, que la marque soit ou non enregistrée au nom du titulaire sous la forme utilisée ;

4° L’apposition de la marque sur des produits ou leur conditionnement, par le titulaire ou avec son consentement, exclusivement en vue de l’exportation ».

Attention, le défaut d’exploitation ne signifie pas une absence totale d’exploitation.

Pour rappel, un usage sérieux est un usage de la marque sur le marché pour désigner les produits et/ou les services couverts par l’enregistrement. Ainsi, tout usage d’une marque ne répondant pas à la fonction essentielle d’une marque telle qu’indiquée ci-dessus, est assimilable à un défaut d’exploitation.

A titre d’exemple et comme cela a été jugé, n’est pas un usage sérieux :

  • La marque utilisée uniquement à titre de dénomination sociale, d’enseigne ou encore de nom commercial ;
  • La marque utilisée à des fins purement décoratives ;
  • La marque utilisée en tant que nom de domaine ;
  • L’apposition de la marque uniquement sur des documents publicitaires.

Ce défaut d’exploitation peut aussi consister en l’exploitation de la marque dans une forme modifiée sauf si ces différences sont négligeables et qu’elles n’altèrent pas le caractère distinctif de la marque en question.

b. La dégénérescence de la marque

Il s’agit ici du motif prévu par l’article L. 714-6 a) du Code de la propriété intellectuelle :

« Encourt la déchéance de ses droits le titulaire d’une marque devenue de son fait :

  1. La désignation usuelle dans le commerce du produit ou du service ; »

Pour rappel, il faut apporter la preuve que la marque est devenue la désignation usuelle du produit/service ou de l’une de ses caractéristiques et que cet usage est répandu dans les milieux professionnels concernés, par exemple.

Il faut aussi apporter la preuve que cette dégénérescence est du fait du titulaire de la marque c’est-à-dire que ce dernier n’a pas tenté d’y remédier.

Il faut donc se référer au public pertinent pour apprécier le caractère usuel de la marque.

Cette dégénérescence ne concerne pas uniquement les marques verbales mais toutes les marques.

c. La marque devenue trompeuse (déceptive)

Il s’agit ici du motif prévu par l’article  L. 714-6 b) du Code de la propriété intellectuelle :

« Encourt la déchéance de ses droits le titulaire d’une marque devenue de son fait :

  1. Propre à induire en erreur, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service ».

L’appréciation du caractère trompeur est effectuée à la date de la demande en déchéance.

Il faudra apporter la preuve que la marque est devenue propre à tromper de manière effective le consommateur d’attention moyenne comme c’était déjà le cas devant les tribunaux.

d. Des motifs propres aux marques collectives ou de garantie

2. Quand peut-on déposer une demande en déchéance

Comme la procédure en nullité, il n’y a pas de délai. Cependant, il y a une spécificité propre à la procédure en déchéance qui exige que la marque contestée soit enregistrée depuis au moins 5 ans.

3. Suspension possible de la procédure

Tout comme la procédure en nullité, la procédure peut être suspendue dans différentes situations :

  • La suspension peut être accordée à la demande des parties pour négocier un accord de coexistence. Dans cette hypothèse, la durée de la suspension est de 4 mais et elle peut renouvelée deux fois.
  • La suspension peut être effectuée à l’initiative de l’INPI dans l’attente d’informations et/ou d’éléments qui peuvent avoir une incidence sur l’issue de la procédure ou bien la situation des parties.

4. Prise d’effet de la décision de déchéance

La déchéance de la marque contestée prendra effet à la date de la demande ou bien à la date à laquelle est survenu un motif de déchéance.

Pour toutes les autres règles applicables (respect du contradictoire, compétence du Tribunal Judiciaire, durée et déroulement de la procédure, force exécutoire de la décision, coût de la procédure), vous pouvez prendre connaissance de l’article relatif à l’ Entrée en vigueur de la procédure en nullité devant l’INPI.

07.05.2020