La société DELFI est une société qui exploite un portail d’actualités parmi les plus importants d’Estonie. Suite à un article concernant une compagnie de navigation, certains internautes ont mis en ligne des commentaires injurieux voire menaçants.

Les propos ont été retirés plus de 6 semaines après leur publication à la demande des avocats de la compagnie de navigation.

Au plan national, DELFI a été reconnue responsable des commentaires rédigés par des internautes (pour la plupart anonymes) et condamnée au paiement d’une somme de 320 euros à titre de dommages-intérêts.

Devant la Grande chambre de la CEDH, la question qui était posée était de savoir si le fait que la responsabilité de DELFI ait été retenue pour des commentaires rédigés par des internautes portait atteinte à sa liberté de communiquer des informations.

DELFI avait mis en place une clause limitative rappelant la responsabilité des internautes, un système automatique de suppression des commentaires repérés à partir de la racine de certains mots grossiers et un système de retrait de notification.

La défaillance de ces systèmes a été constatée par la CEDH puis par la Grande chambre de la CEDH puisque les commentaires injurieux ont été en ligne pendant environ 6 semaines.

La Grande chambre a jugé « qu’il n’est pas disproportionné que DELFI ait été obligée de retirer de son site, sans délai, les commentaires illicites, même en l’absence de notification des victimes alléguées (…)« .

Elle a aussi jugé que la condamnation au paiement d’une somme de 320 euros était dérisoire et donc non excessive.

En droit français, la loi Hadopi I du 12 juin 2009 (article 27-II) a prévu qu’un directeur de publication d’un site n’est pas responsable des commentaires publiés sur celui-ci s’il est établi q’il n’avait pas connaissance du message avant sa mise à disposition ou si, ayant acquis cette connaissance , il a agi promptement pour retirer ce message.

Il ressort de l’arrêt de principe de la Grande chambre de la CEDH que DELFI ne pouvait pas ne pas avoir connaissance des faits puisqu’en raison de leur caractère injurieux et menaçants, cela avait augmenté la visibilité de la page web concernée et donc les revenus publicitaires.

Or, DELFI n’a pas agi promptement pour retirer le contenu. Il a fallu attendre la notification des avocats de la compagnie de navigation.

CEDH, DELFI c/ ESTONIE, 16 juin 2015, requête n° 64569/09

 

30.06.2015